Origine des Embryophytes


De nombreuses études soutiennent que les trois lignées de « bryophytes » sont les premières à avoir divergé à la base des Embryophytes. Comme ces organismes se fossilisent mal, les plus vieux macro-fossiles de Marchantiidae (Hépatiques), Anthocerotidae (Anthocérotes) et Bryidae (Mousses vraies) ne sont pas plus vieux que le Carbonifère. Cependant de nombreuses inférences phylogénétiques, quelques datations moléculaires et des micro-restes trouvés récemment suggèrent fortement une origine au moins ordovicienne (-470 millions d’années) pour les Marchantiidae et les Anthocerotidae, et siluriennes pour les Bryidae (voire ordovicienne également pour ces dernières selon les dernières phylogénies). Des analyses utilisant des gros jeux de données moléculaires (publiées en 2018) proposent la monophylie des « bryophytes », alors que jusqu'à récemment c'était la paraphylie qui faisait consensus. Et de très récentes analyses moléculaires (publiées également en 2018, et soutenant la monophylie des « Bryophytes ») feraient apparaitre les Embryophytes dès la seconde moitié du Cambrien (vers -500 millions d'années).

Relations évolutives au sein des Embryophytes.

Les groupes détaillés dans le site sont en gras, ceux en italiques sont les groupes éteints, ceux entre « » sont vraisemblablement paraphylétiques, nous présentons ici deux positions alternatives pour les Gnetidae (discutées dans le chapitre Spermatophytes) ; POL = Polysporangiophytes, TRA = Trachéophytes, EUP = Euphyllophytes, MON = Monilophytes, LIG = Lignophytes, SPE = Spermatophytes, « PROG » = grade des « progymnospermes ». 

(*) Selon de récentes analyses, les bryophytes au sens large seraient finalement monophylétiques (et donc un clade). Nous proposons ici une irrésolution.

Les Embryophytes forment avec les « algues vertes » (paraphylétiques) le clade des Chlorobiontes ou plantes vertes. Les plantes terrestres s’enracinent donc dans les « algues vertes » et le groupe frère le plus probable appartient au groupe des « charophytes », algues pluricellulaires vivant dans les mares saumâtres ou d’eau douce (chez les Charophyceae ou chez le groupe proche des Coleochaetophyceae selon deux hypothèses alternatives). Les « charophytes » ont un cycle à une génération gamétophytique haploïde. Le gamétophyte produit les gamètes qui via la fécondation donnent un zygote diploïde qui s’entoure d’une paroi résistante lui permettant de survivre à des conditions défavorables comme l’assèchement de la mare. Lorsque les conditions sont requises, le zygote subit directement une méiose et germe en produisant un nouveau gamétophyte. Le zygote, nommé également zygospore, est donc à la fois une unité de dispersion et une unité de reproduction sexuée. Le cycle à deux générations des Embryophytes dériverait du cycle à une génération des « charophytes » par l’ajout de la génération sporophytique (hypothèse de l’intercalation).

Hypothèse de l’intercalation.

Cycle à une génération des « charophytes » (à gauche), les spermatozoïdes (Sz) produits par des gamétocystes ou spermaties (Spi) fécondent (F) les oosphères (Oo) pour donner une zygospore (ZSp) qui par méiose (M) redonne un gamétophyte ; le cycle des ancêtres des Embryophytes (à droite) qui en dériverait, s’en distinguerait par l’ajout d’un sporophyte issu du développement du zygote (en passant par le stade embryon), le sporophyte peut alors produire par méiose au niveau d’un sporange (Sg) des spores (Sp) qui peuvent être dispersées hors de l’eau, préfigurant ainsi le cycle des premières plantes terrestres.

Les « charophytes » de l’Ordovicien avaient une dispersion limitée uniquement aquatique, la « lourde » zygospore restant dans l’eau. L’acquisition d’une génération supplémentaire produisant des spores légères à paroi résistante (possédant de la sporopollénine) autorise également la dispersion hors de l’eau. Les nouveaux organismes à deux générations se dispersent mieux, via le milieu aérien, qu’ils peuvent alors conquérir en acquérant d’autres innovations leur permettant de supporter la dessiccation. Le sporophyte se serait d’abord développé en parasite du gamétophyte dominant tel qu’on l’observe chez les « bryophytes ». Cette hypothèse est bien soutenue si les « bryophytes » sont paraphylétiques. Par contre si ces dernières sont monophylétiques selon les dernières analyses moléculaires, la prépondérance ou pas d'une génération sur l'autre à la base des Embryophytes reste ambiguë.  L’acquisition d’une génération sporophytique impliquant la division du zygote passe donc par un stade embryon définissant ainsi les Embryophytes. On notera également que c’est à partir de l’Ordovicien et du Silurien que les terres émergées commencent à être favorables à la colonisation, la couche d’ozone devenant à l’époque suffisamment efficace pour filtrer les dangereux ultraviolets qui jusqu'à cette période restreignaient la vie à rester aquatique.